A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, j’ai lu plusieurs tribunes sur les réseaux sociaux dans lequelles des femmes dénonçaient des propositions qui leur avaient été faites d’intervenir gratuitement dans des conférences ou des rencontres à l’occasion… de la journée internationale des droits des femmes 🤓
Ca m’a semblé un peu gros. Qu’à l’occasion d’une journée qui vise à sensibiliser aux inégalités, notamment économiques, on demande des prestations gratuites à des femmes. 🆓 Pire. qu’on en appelle à leur sororité pour les faire travailler en pro bono pour des organisations qui n’ont rien de philantropiques. 🤡
Nous sommes dans un pays où les femmes [cisgenre hétérosexuelles] fournissent 1h30 de travail domestique de plus que leur conjoint chaque jour. Si on additionne toutes ces heures on arrive à 3,5 mois par an, l’équivalent de 27% du PIB* 💰🧹
En considérant les écarts de rémunération femmes hommes, on calcule encore que les femmes travaillent gratuitement près de deux mois par an. 👛👩💼
Cette inégalité, je la pensais le produit de biais cognitifs induits par des siècles de patriarcat, mais pas le fruit d’une démarche consciente. Naive que j’étais…🤭
Aujourd’hui, une femme qui dirige une association visant à promouvoir un entrepreneuriat féminin basé sur “l’entraide et la bienveillance” m’a demandé des dates pour venir animer une rencontre avec des créatrices d’entreprises.
Elle s’interessait spécifiquement à un outil d’intelligence collective que j’ai co-créé avec trois femmes, chacune experte dans une profession de l’accompagnement. .🧠 Cet outil représente des centaines d’heures de conception et repose sur des années d’expertise. Si on devait les valoriser, celà représenterait une rondelette somme
Dans un deuxieme mail, elle me précise qu’elle suppose que cette prestation est fournie a titre gracieux, mais qu’au besoin on peut m’offrir mon déjeuner et venir me chercher au RER. 🚉
Je suis restée un peu hébétée ne sachant pas très bien si je devais répondre de ma bonne éducation judéo-chrétienne en demandant pardon pour mon incompréhension et le dérangement ou me lancer dans une explication sur l’ambivalence d’un modèle qui prone l’entraide dans l’entrepreneuriat féminin en s’appuyant sur l’exploitation d’entrepreneuses…🍩
Finalement je m’en suis sortie, comme souvent, en proposant à mon interlocutrice de fixer elle meme le prix qui lui semblerait correspondre à la valeur de mon intervention. Etonnament elle a coupé court. 🔇
Si je vous raconte cette histoire, c’est parce que des propositions de travail gratuit, j’en ai reçu plein par le passé, et que souvent je les ai acceptées.🍐
Au lycée j’ai gardé cinq enfants en très bas âge pendant un été. De leur réveil à leur coucher et weekend inclus. J’ai été payée 15€ par jour -l’équivalent de 21€ de 2024*. A l’époque le tarif pour un baby sitting en soirée (ie. regarder la Star Ac en mangeant des Balisto) c’était 5 balles de l’heure. Mais j’ai dit Merci Madame quand j’ai reçu mon chèque…🐣
Pendant mes études, j’ai fait des stages non rémunérés. C’était avant que ce soit encadré par la loi. ⚖️ En parallèle de mes études j’ai travaillé dans une grande enseigne de bricolage qui me faisait pointer le matin. On décomptait chaque minute de retard de ma paie mais les heures supplémentaires n’étaient jamais ajoutées. 🛠️
En entreprise j’ai appris que travailler “avec une montre” c’était mal et que d’être “sur staffée” c’était cool. 👩💻 Alors loin de moi l’idée de blamer la dame qui me demande de prendre une journée de mon temps, et 6h de TGV pour venir offrir gracieusement le produit de semaines de travail contre une part de quiche et un aller retour à la gare RER. 🍕
Mais peut être qu’on pourrait commencer par se dire que la sororité et l’entraide c’est de refuser ces propositions là pour qu’elles cessent d’être normalisées. 💜
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